La poésie

Qu'es-tu sinon la vision de la nuit?
Tout le nocturne t'appartient.

Tu invites aux splendides banquets des songes
et aux non moins splendides veilles de la réalité.

Tu voyages avec l'homme et la femme comme si tu étais
la larme de leurs yeux, le bourdon de leur félicité
ou l'épaisse fumée des aurores.

Pour toi, mère de la douleur, il n'est rien que gloire et regret,
le milieu du jour n'est pas inscrit sur tes agendas.

Tu n'es pas autre chose, poésie,
que la plus haute cime où le fou,
les mortels,
les déshérites de la chance et de la fortune,
trouvent un refuge.

Toi, la détestée, la lépreuse, la purulente,
tu es la meilleure des femelles
la meilleure mère
la meilleure épouse
la meilleure soeur
et la plus grande, la plus joyeuse des nuits.

Extrait de "Espejo de mascaras", Bogota, 1987

Traduit par Jean Dif